Maîtres et serviteurs : c’est le titre d’un des livres emblématiques de Pierre Michon aux éditions Verdier. Où l’auteur des Deux Beunes qui seront lues ce soir par le comédien Pierre Baux, convoque le nom de Goya que Leonor de Recondo accueillait hier à l’heure de la conférence du soir pour parler de ses Désastres de guerre. Chez Michon, c’est la toute-puissance du désir que la plume explore. Ce « divertissement noir » qui ne sera jamais que l’envers – sinon le pire ennemi – de l’art.
Pierre Michon : « Qu’on m’entende bien – lui, on ne peut plus l’entendre »
Les rapports de maîtres à disciples font l’objet d’une table à la librairie Les arts de lire. « Liens de révérence, d’affection ou de domination avec des essais sur la transmission du savoir dans les domaines de la pensée et de l’art », résume Aline Costella. C’est son collègue Nicolas Seine qui prend le relais : « Nous proposons des livres qui interrogent la manière dont les savoirs passent d’une génération à l’autre dans le cadre de lieux de transmission tels que l’université ou les ateliers d’artistes. Certaines fictions mettent en scène des couples de maîtres et de disciples. Qu’est-ce qui se joue dans cette relation-là ? Qu’est-ce que le disciple doit à son maître ? Qu’est-ce que le maître doit à son disciple ? »
Parmi les titres proposés : De l’un à l’autre, Maîtres et disciples, sous la direction d’Aurélie Dévot chez CNRS Editions. Le très bel ouvrage Transmission/Transgression, maîtres et élèves dans l’atelier : Rodin, Bourdelle, Giacometti, Richier, sous la direction de Claire Boisserolles. Sur cette même table, des romans de Russel Banks, Stevenson, et des classiques : Le nom de la rose d’Umberto Eco, Tous les matins du monde de Pascal Quignard.
Nicolas Seine s’arrête sur un titre en particulier : Le maître des illusions de Donna Tartt (Pocket) : « C’est l’histoire d’un professeur d’université qui a trop d’influence sur ses élèves, une sorte de Cercle des poètes disparus mais en version glauque ». Aussi suggéré, l’essai de Jean-Claude Milner sur Harry Potter, « ce grand roman d’apprentissage » qui décrit « le passage de témoin entre un vieux professeur et un jeune étudiant ».
La librairie Les arts de lire a aussi composé une table sur le voyage : « Il s’agit là d’interroger l’imaginaire du voyage propre à chaque génération », explique Nicolas Seine. « L’impulsion qui donne envie de voyager est différente d’une génération de grands voyageurs à une autre. Les aristocratiques des XVIIIe et XIXe siècles ne voyageaient pas pour les mêmes raisons que les routards d’aujourd’hui. »
Au fond, la question est : pourquoi part-on ? Cela peut être vers « un Orient fantasmé comme chez Pierre Loti », ce même imaginaire « théorisé dans L’orientalisme d’Edward Saïd ». A retenir aussi, dans le même registre, L’histoire des lointains de Luigi Vigarello. Et pour le mythe du vagabond : des livres de sociologie du hobo américain et l’incontournable Sur la route de Kerouac. Quant à la génération « guide du routard », elle se reconnaîtra dans Les chemins de Katmandou de Barjavel.
Pour boucler la boucle, la table s’intéresse aux pratiques de voyage de la nouvelle génération. « Ce qui transparaît, c’est l’envie de vivre des vacances éthiques, solidaires, sans avion ni pollution… Est-ce possible ou assiste-t-on à la naissance d’un nouvel imaginaire ? » La réponse dans les livres.
S. B.