Aujourd’hui, direction la librairie Les arts de lire où Victor Magimel nous fait découvrir une sélection toute en images de livres et de bandes dessinées, en double écho au Banquet de printemps sur les « Monstres et Chimères » et au « choix des corps » de l’édition estivale.
Une virée qui débute dans les chambres à coucher du Moyen Âge avec Chiara Frugoni. Dans Au lit au Moyen Âge (Les Belles Lettres, 2024), l’historienne italienne donne à voir, à travers un livre richesse illustré, la chambre médiévale comme un lieu de repos et de sensualité mais aussi comme le lieu des sociabilités nocturnes : on y joue, mange, parlemente. Mais si « le lit médiéval est le lieu des corps, il est aussi celui des rêves et donc des imaginaires » ajoute Victor.
Car les imaginaires médiévaux sont dignement représentés avec plusieurs ouvrages – tous édités chez Gallimard – de Jean-Claude Schmidt, grand spécialiste de la culture visuelle dans la chrétienté médiévale. Si l’interprétation de l’imagerie médiévale réclame apriori l’apprentissage de codes culturelles et d’une sensibilité d’époque, Les images médiévales. La figure et le corps publié (2023) rappelle aussi que cette lointaine iconographie habite aujourd’hui encore nos perceptions contemporaines des corps.
Mais alors, comment les images expriment-elles les corps d’aujourd’hui ? Victor nous mène vers une sélection de bandes dessinées « centrées sur la vie et l’évolution des corps ». Le librairie du jour conseille en particulier DesSeins (Dargaud, 2015) d’Olivier Pont qui dresse, avec finesse, sept portraits de femmes, complexées, étouffées ou en quête de liberté, ayant en commun une relation forte à leur poitrine. Juste à côté, l’adaptation en bande dessinée par l’illustratrice Maud Mermilliod (2021) du roman Le Chœur des femmes (P.O.L, 2009) de Martin Winckler met également en image une inversion du regard, « celui porté par des femmes sur leurs propres corps lors de consultations en gynécologie, et non plus seulement celui du corps médical sur les patientes. »
Inversion des regards jusqu’à l’inversion des enveloppes corporelles avec Le Cas David Zimmerman des frères Lucas et Arthur Harari (Sarbacane, 2024), une des bandes dessinées coup de cœur de Victor Magimel. Après avoir passé une nuit d’amour avec sa voisine, David Zimmerman, trentenaire un peu paumé, se réveille dans le corps de l’inconnue d’un soir. Il se lance – à corps-perdu – dans une quête « cinématographique très sombre et sans issue » pour retrouver son propre corps.
Retour dans un passé empli de fantasmes enfin avec une dernière bande dessinée signée Sole Otero. Dans Walicho (Éditions çà et là, 2024), l’autrice argentine peint une fresque comique et féministe s’étalant du XVIIIe siècle à nos jours. Au fil des époques et des histoires, trois sœurs sages-femmes dotées de pouvoirs, pratiquant l’avortement, deviennent les symboles de multiples luttes à la fois contre les violences sexistes et le patriarcat, et pour la libération du corps des femmes.
Maxime Lagarde